Southern Asia

En Inde, les adventistes tentent d’y voir plus clair après que des membres se soient reconvertis à l’hindouisme

La cérémonie de reconversion fait craindre que certains intégristes hindous ne soient en train de contraindre les gens à changer de croyance

Silver Spring, Maryland, United States | Andrew McChesney/Adventist Review

Les dirigeants de l’Eglise Adventiste du 7ème Jour se sont tournés vers les autorités indiennes, leur demandant d’ouvrir une enquête pour déterminer si les adventistes d’un village situé dans le nord de l’Inde, ont été forcés à se reconvertir à l’hindouisme.

La conversion forcée est illégale en Inde et une cérémonie de reconversion qui s’est déroulée à Asroi,  situé environ à 175 km au sud de la capitale indienne, New Delhi, la semaine dernière,  a soulevé les craintes de la communauté chrétienne, qui se demandent si des hindous intégristes n’auraient pas forcés des gens à se reconvertir, dans une partie du monde pouvant se révéler assez difficile pour les missionnaires.

« Nous avons logé une pétition auprès des autorités civiques locales et auprès des autorités supérieures, réclamant une enquête, » a déclaré T. P. Kurian, directeur des communications au sein de la Division d’Asie du Sud.

Il a ajouté : « Pourrais-je vous demander de ne pas oublier de mentionner ce sujet dans vos prières ? »

Les derniers membres de l’église d’Asroi, se sont reconvertis à l’hindouisme, lors d’une cérémonie qui a eu lieu le 26 août dernier, ont déclaré les dirigeants d’église, dimanche. Cette église, qui avait ouvert ses portes avec 33 membres en 2005, n’en comptait plus que 6, après la cérémonie de reconversion.

« Selon certaines sources, il est évident qu’il y a certains groupes fondamentalistes hindous derrière ces dégâts, qui ont forcé ces croyants à revenir à leurs anciennes croyances, » a déclaré Mohan Bhatti, directeur des communications pour le compte de l’Union du Nord de l’Inde, citant le rapport soumis par une délégation de 4 adventistes, ayant visité le village, la semaine dernière.

L’église sous surveillance policière

Les média indien ont rapporté que des douzaines d’adventistes actifs et non-actifs, s’étaient reconvertis durant la cérémonie et que des intégristes avaient fait de l’église d’Asroi, un temple hindou, dédié au dieu Siva, remplaçant la croix par une idole. Les articles comportaient une photo de deux hommes suspendant un poster de Siva à un mur  d’église.

Mais la délégation qui a effectué le déplacement n’a trouvé aucun indice prouvant que l’église avait été dérangée.

« On n’a pas retrouvé l’idole de Siva sur place et l’église n’avait pas été reconverti en temple, » ont déclaré les délégués dans leur rapport. « Il semblerait que le poster de Siva ait été suspendu là pendant un bref instant pour des raisons de tournage et de publicité. »

Le rapport continue en ces termes : « Le bâtiment abritant l’église est sous surveillance policière, sur ordre des autorités administratives qui veulent éviter tout incident malencontreux. Nous sommes autorisés à avoir nos services d'adoration hebdomadaires. »

Bhatti est d’avis qu’une enquête officielle s’impose « autour de ce sujet délicat qui pourrait provoquer des conflits au sein de la communauté. »

L’historique de l’église d’Asroi

L’histoire de l’église d’Asroi remonte à 2001, quand 33 villageois acceptèrent la foi adventiste, se souvient les responsables adventistes locaux. Le terrain où a été construite l’église fut acheté en 2004 et des volontaires de Maranatha International, une organisation à but non-lucratif, construisit l’église l’année suivante.

Le taux de fréquentation connut une baisse dans les années qui suivirent. Deux familles cessèrent de fréquenter l’église en 2007, ne laissant derrière elles que 20 personnes pour les classes de l’école du sabbat. Au moment de la cérémonie de reconversion, ils n’étaient plus que 5 ou 7 à fréquenter régulièrement l’église.

Le nombre d’adventistes qui se sont reconvertis reste encore incertain, les média indiens, citant des activistes indiens ont avancé le chiffre 72, bien que cela ne cadre pas avec les chiffres avancés par les responsables d’église.

La perte des derniers membres d’église a surpris le pasteur, a déclaré  S. P.  Singh, un responsable adventiste local, qui faisait partie de la délégation ayant visité cette église.

« Le pasteur local, Vikas Paswan, s’occupe de cette église depuis 10 ans, » a-t-il déclaré. « Il dirigeait le service d’adoration régulièrement. Il ne s’est jamais douté un seul instant qu’une telle chose puisse se produire. »

Il a demandé à ce que les membres d’églises prient pour l’église d’Asroi et son pasteur.

« Notre pasteur a besoin de nos prières ferventes en cette période si éprouvante, » a-t-il ajouté. « Encourageons-les par nos prières et notre soutien. »

L’Eglise Adventiste mène sa propre enquête dans cette affaire.

Les hindous qualifient de volontaire ces reconversions

Khem Chandra, qui s’est rendu à la cérémonie de reconversion et qui est un membre de Rashtriya Swayamsevak Sangh, un groupe nationaliste hindou, a déclaré que ce qui s’était passé était on ne peut plus limpide !

« Ils ont choisi de partir, et aujourd’hui ils se sont rendus compte de l’erreur qu’ils avaient commises et ont voulu revenir, » a-t-il déclaré au Times of India, dans un article paru jeudi. « Nous les accueillons à bras ouvert. »

Chandra a révélé qu’il avait rencontré 8 familles adventistes à maintes reprises au cours de ces dernières années, les encourageant vivement à revoir leur foi.

La notion que la reconversion se soit effectuée volontairement, a été accueillie avec beaucoup de scepticisme.

« Tout individu a le droit de se convertir à la religion de son choix, mais de telles conversions de masse, implique une pression politique, sociale, physique et des menaces de violence, » a déclaré John Dayal, un membre du Conseil National d’Intégration, un groupe de hauts politiciens et de figures publiques, formé voilà 50 ans, dans le but de trouver des moyens pour résoudre les problèmes qui divisent la société indienne. Dayal s’est entretenu avec UCAnews.com, un site de presse indépendant catholique.

D’anciens adventistes s’expriment

Un ancien adventiste, interviewé par le Times of India, a déclaré que le désenchantement avec le système de caste qui régit l’Inde, l’avait conduit à l’adventisme puis de nouveau à l’hindouisme.

« En tant qu’hindous, nous n’avions aucun statut et étions réduits à des tâches subalternes, mais 19 ans après m’être fait chrétien,  nous avons remarqué que personne ne venait à nous, depuis leur communauté, » a déclaré Anil Gaur. « Il n’y a jamais eu la moindre célébration de Bada Din (Noël). Les missionnaires se sont contentés de nous construire une église dans la localité, et c’est là que certains d’entre  nous se sont mariés. Et c’est tout ! »

Singh, un membre de la délégation qui a visité cette église, la semaine dernière, a déclaré dans son rapport à l’Union du Nord de l’Inde, qu’il avait visité par trois fois cette église, dans le passé, et qu’au cours d’une de ces visites, notamment en 2012, il avait supervisé des réparations et s’était assuré à ce qu’ils reçoivent des tapis pour le sol, des livres de chants, des Nouveaux Testaments et du matériel pour se fabriquer un pupitre.

Un autre ancien membre d’église, Rajendra Singh, 70 ans, a quant à lui déclaré au journal, qu’une frayeur d’ordre physique survenue à l’extérieur de l’église du village l’avait convaincu de partir.

« Alors qu’un jour je dormais à l’extérieur de l’église, j’ai souffert d’une attaque de paralysie, » a-t-il déclaré. « J’ai été incapable d’esquisser le moindre geste. Cela se passait l’année dernière et depuis je me suis demandé si ce n’était pas Mata Devi qui me punissait pour avoir abandonné ma foi. »

Chandra, l’activiste indien, a exprimé son espoir de voir s’ouvrir très bientôt le premier temple hindou du village, peut-être même dans le bâtiment qui abrite l’église adventiste !

« Nous penserons au bâtiment qui abrite l’église. Il appartient aux missionnaires, mais le terrain sur lequel il est bâti, appartient à l’Hindoustan, » a-t-il déclaré. « Nous n’allons consentir à aucun compromis en ce qui concerne notre « dharti » (terre). Nous aurons une rencontre avec les villageois et prendrons une décision à propos du temple. »

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