Le cauchemar continue pour Monteiro

Un an déjà et toujours rien. Je pense au pasteur Monteiro, chaque jour qui passe, depuis que je l’ai rencontré dans la prison civile de Lomé, au Togo.

John Graz

Un an déjà et toujours rien. Je pense au pasteur Monteiro, chaque jour qui passe, depuis que je l’ai rencontré dans la prison civile de Lomé, au Togo.

Nous faisons tous des cauchemars de temps à autre, mais ils ne durent jamais trop longtemps. Dans le cas de Monteiro, sa réalité est devenue un cauchemar continu.

Monteiro a été invité par l’Eglise Adventiste du Septième Jour au Sahel, afin de venir en aide aux familles en tant que missionnaire. En mai 2011, des rumeurs ont commencé à circuler au sujet de la disparition de 20 jeunes femmes, qui ont par la suite trouvées la mort dans le cadre d’un réseau de trafic de sang humain, au nord de Lomé.

Comme c’est souvent le cas dans une affaire de ce genre, les gens ont accusé la police et les autorités de n’avoir rien fait pour résoudre ces crimes.

Le 15 Mars 2012, les policiers ont procédé à l’arrestation de Monteiro. Son bureau, son église et sa maison ont été perquisitionnés sous les feux des projecteurs des médias. Aucune preuve ne fut découverte. Il a été détenu pendant 14 jours au QG de la police.

Toute l’affaire repose sur les allégations d’une seule personne. Celui qui accuse Monteiro est un ex  détenu qui affirme que Monteiro est à la tête du trafic de sang humain. Dans le passé, Monteiro avait eu l’occasion de venir en aide à cet homme, dans l’exercice de son ministère. Il semblerait que cet homme ayant été placé en garde à vue, a commencé à accuser, sous contrainte policière, les gens qu’ils connaissaient et avec qui il avait été en contact. Cet homme, qui a un passé d’instabilité mentale, a balancé les premiers noms qui lui venaient à l’esprit.

Ces événements ont eu un effet dévastateur sur l’épouse et les enfants de Monteiro, ainsi que sur ses collègues et sur les membres d’églises. Le nom de leur mari, père et ami faisait la une des actualités télévisées et les gros titres de tous les journaux nationaux.
Au bout de quelques jours, une enquête et une confession publique de l’accusateur ont été diffusée telle une pièce de théâtre. Aucune preuve n’ayant été trouvée, il semblait évident pour plusieurs que l’arrestation de Monteiro était une erreur. Certains ont également trouvé très étrange qu’un pasteur adventiste se retrouve accusé d’avoir utilisé du sang humain au cours d’une cérémonie religieuse.

Les accusations formulées contre Monteiro manquaient singulièrement de crédibilité. Tous s’attendaient à ce qu’il soit relâché et que l’affaire soit classée sans suite.

Mais le relâcher aurait soulevé quelques questions : « Qui endosserait la responsabilité d’une telle erreur ? Qui s’adresserait aux médias pour s’excuser d’avoir fait une erreur ? » Et la population aurait demandé : « Qui sont les vrais criminels et pourquoi n’ont-ils pas été arrêtés ? » Ce serait hautement embarrassant pour les autorités d’avoir à répondre à de telles questions !

Monteiro est toujours en prison,  ainsi que Bruno Amah, un autre adventiste, accusé du même crime. L’établissement est surpeuplé et les prisonniers essayent de survivre. Des innocents qui attendent que leur affaire soit entendue cohabitent avec des criminels, partageant le même espace pour dormir.

Je me souviens de ma première rencontre avec Monteiro. Il était vêtu d’un t-shirt propre, et j’aurais pu le prendre pour un visiteur. Nous avons prié ensemble. Je lui ai expliqué ce qui avait déjà été fait dans le but d’obtenir sa libération, et nous espérions qu’il serait libéré dans les jours ou les semaines à venir.

C’était le samedi, 08 Septembre 2012.

Ces hommes ont passé Noël en prison. D’aucuns espéraient que les autorités mettraient un terme à cette tragédie. Au point où en étaient les choses, il ne s’agissait ni plus ni moins que de détention arbitraire ! Il n’a toujours pas eu droit à un procès. Nous avons contacté des ambassadeurs, des ministres et des présidents. Mais toujours rien.

Plus tard, notre avocat a reçu la nouvelle que le procès de Monteiro devrait avoir lieu le 29 ou le 30 Janvier, en cour pénale. Ce n’était pas une nouvelle extraordinaire, mais au moins l’affaire Monteiro serait entendue, lui permettant ainsi de se défendre avec l’aide de son conseiller juridique.

Mais le procès a été reporté. Il ne s’est rien passé et ils sont toujours en prison.

Nous avons envoyé une missive au président du Togo, pour lui demander que justice soit faite.

De nouvelles rumeurs circulent au sujet de l’arrestation imminente de criminels. Mais jusqu’à présent, Monteiro et Amah sont toujours en prison. Nous n’abandonnons pas. Nous voulons un procès équitable, et nous sommes certains que leur innocence sera prouvée.

Le 15 Mars, cela fera un an depuis l’arrestation de Monteiro et Amah. Nous espérons qu’ils seront libérés avant cette date. Nous envisageons de lancer une campagne afin de récolter des signatures et d’envoyer des lettres provenant de toutes les parties du monde, adressées  au président du comité des Droits de l’Homme aux Nations Unies et au président du Togo.

L’épouse de Monteiro, ses quatre enfants et la famille d’Amah doivent savoir que nous faisons tout notre possible pour leur venir en aide. Ils ne sont pas seuls. Ils forment partie d’une famille de plus de 30 millions de membres d’églises.

Nous pouvons nous sentir impuissants quand des innocents casquent à la place de criminels toujours en liberté. Mais nous croyons que Dieu aura le dernier mot. Sa justice prévaudra en fin de compte.

John Graz est le directeur du département des Affaires Publiques et de la Liberté Religieuse au sein de l’Eglise Adventiste Mondiale. Il est à la tête du groupe qui travaille sur l’affaire Monteiro à partir du QG de l’Eglise Mondiale.

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