Le prix du préjudice

Le cas Chamberlain en Australie a eu beaucoup d’incidence sur les adventistes dans les années 1980

James Standish

« Toi, tueuse de bébé ! » hurlaient des écoliers,  après Julie, alors que cette dernière marchait pour se rendre à son école adventiste, à Strathfield, en 1980. Elle ignora les quolibets comme elle le faisait chaque jour, depuis que l’affaire Chamberlain avait fait la une des tabloïds. Mais cette fois, alors qu’elle continuait sa route, une cannette de Fanta à moitié remplie, frôla sa tête sous les huées de ces garçons.

Julie ne fut pas la seule. Beaucoup d’australiens adventistes de cette époque ont des anecdotes à propos de harcèlement. Il pouvait s’agir de coups de fils bidon ou d’insultes en public. La haine qui a jalonné cette bigoterie anti-adventiste était plus qu’inconfortable ; elle a probablement été la raison qui a poussé à poursuivre en justice les Chamberlain, et a donné lieu à l’erreur judiciaire qui s’est ensuivie.

Alors que nous entamons le processus de guérison des cicatrices de cette époque, il nous incombe d’évaluer avec soin, ce que nous avons appris au sujet de nos vulnérabilités nationales pendant ce processus, aussi bien de déterminer ce qu’il nous reste à apprendre.

Ce qu’il y a de particulièrement surprenant au sujet de la bigoterie de cette époque, c’est qu’elle ait existé ! L’Australie est après tout, une des sociétés les plus diversifiées et une des plus tolérantes au monde. Quand nous observons les attaques menées contre les minorités dans le monde, nous secouons la tête. La brutalité, le tribalisme, l’ignorance et le syndrome du bouc-émissaire qui entourent la haine qui a été déversée contre les minorités, dans l’Europe des années 1930 ou celle qui est déversée contre celles de l’Iran des temps modernes,  nous semble totalement étrangère et lointaine. Et si vous deviez vous en prendre à une dénomination quelconque, il aurait fallu que ce soit des adventistes qui prônent le végétarisme, la non-violence, qui apportent leur soutien dans le domaine de la santé, qui fabriquent du granola, qui sont attachés aux valeurs éducatives et qui ont contribué au développement de la société australienne depuis plus d’un siècle, avant que ne surviennent l’affaire Chamberlain ?

S’il était possible d’être en sécurité quelque part, cela aurait dû être possible pour une communauté de foi pacifique ayant son histoire et ses racines  ancrées dans une société tolérante et progressive. 

Et cependant, au sein de notre société, de notre vivant, les tabloïds ont fait des déclarations les plus viles et les plus diffamatoires afin de soulever un sentiment de haine intense contre les chrétiens adventistes. Et cela a permis aux démons intérieurs de plusieurs australiens de donner libre cours à leurs pulsions. Quand il y a trois décennies de cela, Lindy Chamberlain fut condamnée à purger une sentence de travaux forcés à perpétuité, il a été rapporté que des vivats se sont fait entendre dans tous les pubs de Darwin. C’est terrifiant ! Mais cela a bien eu lieu ! C’est le résultat d’une propagande chargée de haine, mêlée à une mentalité de populace, et cela au sein d’une société dite moderne. 

Wendy Harmer, une comédienne de renom, s’est très gracieusement excusée mardi, pour le rôle qu’elle a jouée dans la propagation de bigoterie, faisant remarquer que « la haine était telle qu’on avait perdu toute rationalité. »

Les leçons les plus profondes que nous puissions tirer de l’affaire Chamberlain n’ont rien à voir avec les dingos, ou mêmes avec les défaillances de notre système judiciaire. La leçon la plus profonde est celle que nous avons apprise sur nous-mêmes : nous savons à présent que nous pouvons nous transformer en une populace aussi aisément que toute autre société, quel que soit l’époque.

Alors, demeurons vigilants ! Parce que s’il y a une chose qui est certaine, tôt ou tard, il y aura une autre vague de violence qui va déferler contre une communauté australienne. Et si nous n’avons pas la force de caractère et le courage de nous insurger contre ce phénomène, les résultats seront une fois de plus, terrifiants. 

La prochaine fois, en tant qu’adventiste du septième jour, je veux être présent pour épauler quiconque aura été pris pour cible, afin de le défendre et défendre par la même occasion ce qu’il y a de mieux dans nos idéaux et au sein de notre nation.

-- James Standish est le directeur des communications pour la Division du Pacifique Sud qui est basée à Wahroonga, non loin de Sydney. Il a précédemment servi en tant que secrétaire au sein du comité des ONG pour la liberté religieuse  aux Nations-Unies, et a reçu une récompense de la communauté Sikh en Amérique, pour sa défense des droits civils dans le sillage des attentats du 11 Septembre.

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