West-Central Africa

TROISIEME ARTICLE DE LA SERIE : Après l’arrestation, le combat pour la libération de Monteiro

Behind the scenes, lawyers went to work, diplomacy intensified

Silver Spring, Maryland, United States | ANN staff

La nuit où Antonio Monteiro a été arrêté, son employeur, le président de l’Union Mission du Sahel, Guy Roger, s’est rendu avec quelques collègues au quartier général de la police pour s’enquérir de la motivation de l’arrestation. A leur grande surprise, ils furent arrêtés, leurs clés et leurs véhicules confisqués. Aucune raison ne leur fut donnée.

Ils furent relâchés deux heures plus tard, et le lendemain martin Guy Roger chercha à obtenir l’aide d’un avocat. Antonio Monteiro avait été accusé de meurtre, de conspiration et d’association criminelle.

« Nous vivons un vrai cauchemar, » écrivait Guy Roger dans un email adressé à Yovo Sika Adjete, le conseiller juridique de l’Union du Sahel. « On nous a dit qu’il [Monteiro] avait été arrêté suite à une investigation et que notre courte détention faisait aussi partie de l’enquête.

« J’en appelle à vous afin que vous tentiez de découvrir les raisons de cette détention, » écrivait encore Guy Roger.

C’est là qu’ont débutées les démarches pour faire libérer pasteur Monteiro. Cela fait près de 500 jours que le processus est en cours.

Les leaders de l’Eglise Adventiste du Septième jour ainsi que les ambassadeurs nationaux ont déployé des efforts diplomatiques au Togo, à travers l’Europe et aux Nations Unies à New York. Des avocats locaux ont tenté de nombreux appels. Cependant, Antonio Monteiro qui est venu au Togo en provenance du Cap-Vert pour servir en tant que missionnaire, est toujours incarcéré. Trois autres membres d’église Adventistes sont en prison avec lui, de même qu’une autre personne qui a volontairement fourni à la police des informations qui pourraient aider à les faire libérer.

Le lendemain, le 16 mars 2012, Guy Roger apprenait que le membre d’église Adventiste Bruno Amah avait également été arrêté dans le cadre de cette affaire. Antonio Monteiro et Bruno Amah avaient auparavant cherché à aider un homme dénommé Simliya, un individu ayant un passé d’instabilité mentale, d’après ce que révèle un rapport médical diligenté par le tribunal.

Au cours des jours qui suivirent, Guy Roger a alerté ses collègues de la Division de l’Afrique du Centre-Ouest à Abidjan en Cote d’Ivoire ainsi qu’au siège mondial de la dénomination à Silver Spring dans le Maryland aux Etats Unis. Il a aussi écrit à la plus proche ambassade du Cap Vert à Dakar au Sénégal.

Guy Roger a aussi décrété deux jours de jeûne et de prière dans l’union à partir du jeudi 22 mars.

Pendant plusieurs mois, l’Eglise Adventiste a choisi de garder les démarches judiciaires ainsi que les efforts diplomatiques hors du regard des médias publics.

« A l’époque, nous avons choisi cette tactique par respect pour le processus gouvernemental et pour la sécurité des membres d’église dans le pays, » a déclaré John Graz, le directeur des Affaires Publiques et de la Liberté Religieuse pour la dénomination.

L’avocate de pasteur Monteiro, Yawa Sika Yovo, a déclaré qu’elle avait demandé à un juge le 28 mars 2012 d’annuler la procédure. Pour toute réponse, sa requête a été accueillie par un silence, dit-elle.

En compagnie de l’avocat de Bruno Amah, Afoh Katakiti, elle se rendit au Ministère de la Justice le 21 juin. Le ministre, dit-elle, promit de se pencher sur le dossier. Rien ne se produisit, donc ils décidèrent de présenter le cas devant la Cour d’Appel de Lomé.

Le 6 juillet de cette année là, la cours rendit une décision qui disant en partie : « Il n’y a aucun élément documenté prouvant son innocence. Il doit demeurer en détention. »

Yovo a cherché à faire d’autres appels, sans succès. Outrée, le 7 aout, près de cinq mois après l’arrestation d’Antonio Monteiro et de Bruno Amah, elle a écrit ceci au président du Togo, Faure Gnassingbé : « Cette scandaleuse décision est une grave injustice et est inadmissible, vu que nos clients sont innocents, il n’y a en effet aucune preuve indiquant leur culpabilité. »

Au début de cet été là, Ganoune Diop, l’agent de liaison de l’Eglise Adventiste aux Nations Unies, a rencontré l’ambassadeur du Togo à l’ONU, Menan Kodjo le 25 juillet. Kodjo a indiqué qu’il se pencherait sur le cas, rapporte Ganoune Diop. Dans une lettre faisant suite à cet entretien, Ganoune Diop a remercié Menan Kodjo pour son travail sur cette affaire et a mis l’accent sur le fait que l’Eglise Adventiste mondiale souhaitait respecter les procédures du gouvernement : « il n’est pas dans notre intérêt d’exposer devant la communauté internationale d’experts le système judiciaire du pays que Son Excellence représente si efficacement.

En Septembre, les présidents du Togo et du Cap-Vert ont parlé de l’affaire en marge d’une Assemblée Générale de l’ONU, d’après ce qu’indiquent les informations postées sur la page Facebook du président du Cap Vert.

« J’ai tenté d’éveiller son intérêt pour cette affaire, » a déclaré le président du Cap-Vert, Jorge Carlos Fonseca, au sujet de sa rencontre avec le président togolais, Faure Gnassingbé. « Je lui ai dit que je ne voulais pas m’ingérer dans la question de la justice togolaise, mais que le public Cap Verdien s’intéressait au problème. Je lui ai donc dit que nous souhaitions que la suite des évènements se fasse dans un environnement où la sécurité de la défense était assurée. »

Le 5 Septembre 2012, un duo venant du siège de l’église s’est envolé pour le Togo. John Graz, le directeur des affaires publiques, et le Conseiller Juridique Général adjoint, Todd McFarland ont rencontré Yovo et ont visité Antonio Monteiro et Bruno Amah en prison. Ils ont également lu le rapport médical qui venait d’être publié par Dr Tchangai Tchatcha à la demande du tribunal ; Dr Tchatcha déclarait dans ce rapport que celui qui accusait Antonio Monteiro avait un passé d’instabilité mentale et n’avait donné à la police des noms de prétendus co-conspirateurs qu’après avoir été battu lors de sa garde à vue. Le rapport offrait un rayon d’espoir.

« Je pensais vraiment qu’il aurait été libéré avant que Ted Wilson effectue sa visite, » a plus tard déclaré McFarland, faisant allusion au président de l’Eglise Adventiste mondiale qui visiterait pasteur Monteiro en prison le 12 novembre.

L’Eglise a aussi agi par le biais d’un représentant de l’Association Internationale pour la Défense de la Liberté Religieuse en Europe, qui a rencontré des responsables togolais au Bureau des Nations Unies à Genève en Suisse, et aussi avec d’autres responsables à l’Union Européenne à Bruxelles en Belgique.

Cependant, toujours rien ne se produisait, en dépit des efforts diplomatiques menés pendant tout l’été et jusqu’au début de l’automne.

Alors l’Eglise Adventiste a décidé de rendre l’affaire publique. ANN a publié son premier récit sur la situation le 27 septembre.

Le 20 Novembre, un groupe de travail chargé de cette affaire a été mis en place au siège mondial de l’église. Ce même jour, le président de l’Eglise Adventiste mondiale, Ted N.C. Wilson a décrété une journée internationale de prière le 1er décembre.

« Ce sont des membres d’église innocents qui sont accusés faussement et nous plaidons avec le Seigneur pour qu’Il intervienne afin qu’ils soient à nouveau réunis avec leurs familles et puissent continuer leur travail, » a dit Ted Wilson.

Le 29 novembre, Guy Roger, président de l’Union Mission du Sahel, a tenu une conférence de presse à Lomé, amplifiant ainsi la campagne mondiale pour la journée mondiale de prière.

Ces hommes sont « privés de leur liberté et détenus à la prison civile de Lomé sans aucune preuve de culpabilité, sans aucun élément ou indication d’une relation quelconque avec cette affaire, » a dit Guy Roger à un groupe de reporters. « L’Eglise Adventiste ne peut demeurer silencieuse dans ce qui a tout l’air d’une énorme erreur judiciaire. »

Le 1er décembre, des dizaines de milliers d’églises Adventistes à travers le monde ont pris le temps au cours du service du sabbat, de prier pour pasteur Monteiro et les autres qui sont encore en prison. D’autres, comme par exemple l’Eglise de l’Université de Montemorelos au Mexique, ont prié pendant plus d’une heure lors du service d’adoration du sabbat.

Plus de 7 millions d’utilisateurs de Twitter avaient été contactés avec le hashtag de la campagne #Pray4togo et quelques 15000 personnes avaient signé une pétition en ligne sur le site Change.org

L’église a aussi sponsorisé une campagne de cartes de Noël pour montrer son soutien. Pasteur Monteiro a reçu plus de 1000 cartes, ont indiqué les dirigeants de l’église.

Au début de l’année nouvelle, un rebondissement eut lieu et avec lui l’espoir d’une date de procès pour le 29 janvier. Plus tard cela a été annulé.

Ganoune Diop, l’agent de liaison de l’église à l’ONU, s’est rendu au Togo en février et a rencontré le premier ministre du Togo. Lors d’une rencontre un matin, Diop a indiqué que le premier ministre Kwesi Ahoomey-Zunu a appelé le ministre de la justice et lui a demandé s’il pouvait recevoir Ganoune Diop un peu plus tard ce même jour. A 17 h, Diop était reçu par le ministre de la Justice Kokou Tozoun. « Il nous a donné sa parole que cette affaire serait réglée avant la fin du mois de mars, » se souvient Ganoune Diop.

« J’ai dit au Ministre de la Justice et au Premier Ministre que nous n’essayions pas de contourner le système judiciaire togolais ou d’obtenir une faveur, » se souvient encore Ganoune Diop. « Nous cherchions à demander que cette affaire soit résolue parce qu’il s’agissait d’un cas de détention arbitraire. »

Le 18 avril, l’Eglise Adventiste a publié un extrait vidéo de la famille d’Antonio Monteiro, invitant davantage de personnes à signer la pétition en ligne.

En Mars, les dirigeants de l’église ont annoncé qu’un cinquième appel demandant la libération de pasteur Monteiro avait été rejeté.

 

Traduction: Patrick Luciathe

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